- Henri Clouard, extrait de Histoire de la Littérature française – Du symbolisme à nos jours, vol. 2 [De 1915 à 1940]. Albin Michel, 1949. p. 174 :
Fagus, né Georges Faillet à Bruxelles de communards proscrits (1872-1933), a porté en lui, et y faisant bon ménage, du Jordaens et du Fra Angelico. Doux candide et fleur amère des cités, tout instinct d’animal était sien, et aussi toute spiritualité, toute espérance, tout savoir. On le découvrait historien et érudit, grammairien et moraliste dans ses proses d’Aphorismes, d’Éphémères, de Pas perdus. Mais ses vers le révèlent si profondément poète qu’il semble l’avoir été uniquement. En parallèle au cycle d’Ixion (1903) et de la Danse macabre, Fagus mena la rédaction et, de 1893 à 1896, puis de 1918 à 1920, les remaniements d’un poème, La Guirlande à l’épousée, expérience vécue où une sensualité de feu arrive toujours à s’épanouir en chasteté poétique, où l’intensité d’amour avoue la mort pour sœur. Une antithèse écartèle la pensée lyrique de Fagus vers deux pôles : la femme monstre charnel de l’Enfer, la femme vierge-mère. Fagus a parfois commis des erreurs. Son vocabulaire a parfois cultivé la rareté voire la cuistrerie ; cela lui venait de vieilles habitudes « décadentes ». On a même vu son style s’égarer dans le désordre, on a entendu sa versification grincer. Mais ces accidents ne compromettent jamais irrémédiablement une poésie débordante de vie, gorgée de science digérée, illuminée de visions.