- Léon Deffoux, « Fagus », L’Intransigeant, 11 novembre 1933, p. 6 :
Hier, comme nous rentrions du « bout de l’an » de Guillaume Apollinaire, nous avons appris la mort de Fagus, tué à la porte de son domicile, dans la calme rue Visconti, par un camion automobile.
Il était sept heures du soir, mercredi. Fagus venait de faire une courte promenade jusqu’au quai et, après avoir acheté son journal, il allait franchir le seuil de son logis, au numéro 12, lorsqu’un gros camion qui, d’après tous les témoignages, allait dans cette étroite rue à une vitesse excessive, l’accrocha de son aile gauche et le projeta violemment sur le sol.
Transporté à l’hôpital de la Charité, Fagus y mourut à 22 h. 15.
Un vrai, un pur poète, cet homme à l’allure timide, au regard bleu, de petite taille, toujours enveloppé d’une pèlerine à capuchon ; un vrai, un pur poète, un esprit primesautier, plein de flamme, de foi et de tendresse ; un des rares à connaître profondément l’âme populaire et qui parfois savait chanter comme un enfant ses joies et ses mélancolies. Ainsi dans cette pièce, une de celles que ses amis savent par cœur :
Pourquoi, Seigneur, les hirondelles
Si bas, puis si haut votent-elles
Qu’en savent-elles,
Qu’en sais-je, rien ;Et moi, pourquoi gai, puis morose
Pourquoi mes vers, pourquoi ma prose
Pourquoi sous mes doigts cette rose
Qu’en sais-je, rien.
Ces huit vers, Fagus les écrivit un soir, en traversant le pont des Arts qu’il appelait « le balcon de Paris ». Un soir où, comme avant-hier, il venait de rêver un moment sur la ville avant de regagner sa chambre…